Aterissage

Avalanche de prob­lèmes depuis que j’ai débar­qué à Madrid. Le van est à l’ar­rêt. J’ap­pelle la dépan­neuse. L’ou­vri­er pose les pinces. « Rouler le plus longtemps pos­si­ble ! ». A Épi­la, deux cents kilo­mètres plus loin, je vais boire un café. Plus de con­tact au tableau. Une brute de garag­iste roumain me prend Euros 10.- pour pos­er les pinces. En même temps j’ai mal aux dents mais ne peut me gar­er pour voir ce que c’est. Arrivé à Agrabuey j’al­lume la mai­son, comme je passe devant le miroir je remar­que que j’ai la gueule plus enflée qu’une pastèque. Je veux porter la main pour tâter, le bras résiste. Il y a un instant je con­dui­sais et main­tenant le bras ne se lève plus ! Si pour­tant, il se lève, et je hurle de douleur. Alors je tâte et hurle une deux­ième fois, tâte la gen­cive droite, elle est dure. Il est minu­it, je me couche. A sept heures, je ne dors tou­jours pas. Je sors. Sur la place du vil­lage, je branche mes pinces autonomes, le van démarre. Car je n’ai rien à manger dans la mai­son. Les achats finis, je veux redé­mar­rer le van. Rien. Je cherche qui sol­liciter sur le park­ing du super­marché. Un aimable français en car­a­vane con­necte les câbles. Sans effet. J’ap­pelle la dépan­neuse. L’ou­vri­er m’en­gage à me ren­dre directe­ment dans un garage. Là, le patron se penche sur le moteur. Appelle con col­lègue, appelle le sec­ond col­lègue. Tous sont per­plex­es. Juste avant la fin de l’ho­raire com­mer­cial (18h50), le patron com­mande une bat­terie. Elle est livrée, il l’in­stalle. Je paie Euros 369.- Il espère que ça ira. Fort de cet espoir, je ren­tre (ordre de ne pas caler) à Agrabuey. Minu­it, je me couche. A qua­tre heures, la douleur est épou­vantable tant dans la mâchoire que dans le bras. A sept heures trente, je n’ai tou­jours pas fer­mé l’œil. A dix heures trente (il faut atten­dre que les médecins com­men­cent leur journée de tra­vail), je me rends aux urgences de l’hôpi­tal. Jambe cassée ou rhume, on vous donne la même chose : cal­mant et antibi­o­tique. C’est ce qu’on me donne. Mais il y a l’ef­fet psy­chologique : « ça va aller », dit l’in­fir­mière. La nuit je ne dors pas, la nuit je ne peux pas me retourn­er, pas bouger, la mâchoire comme le bras, tout me fait hurler. Il pleut. Il y a des éclairs. Il n’y a plus internet.