Bon mot

Cet ordre des phras­es qui aboutit au bon mot, témoigne de votre esprit, place en société. Dans le groupe des sym­bol­istes (Rég­nier, De Gour­mont, Schwob), le souci est con­stant. Pas le bon mot des vaude­villes qui est une jon­g­lerie, un à‑propos, une cla­que­tte, le trait d’e­sprit, ce jeu pro­fond qui en quelques syl­labes capte et sidère. En tant que régime lit­téraire et social, il per­siste et tourne à l’in­quié­tude — peut-être parce qu’il se perd — chez les mod­ernes Valéry, Léau­taud, Gide. Longtemps il est cul­tivé. Le ciné­ma en joue. Dans un film comme “La maman est la putain”, cent cinquante ans après la fin de la cour royale, Eustache s’en moque, mais c’est du ciné­ma, c’est répété, chauf­fé et réchauf­fé. Donc il se peut que cet art fin, qui oblige au cal­cul en temps réel, déjà pose des dif­fi­cultés aux inter­locu­teurs. Aujour­d’hui? Où les ouvri­ers en langue pensent que la rime fait le poète? Puis l’Amérique lit­téraire est passée par là! “J’i­rai cracher sur vos tombes”, c’est d’abord l’aveu de la fin du monde-langue.