Message électronique de la banque hongroise que je découvre par hasard: “sans vérification rapide de vos identités, nous nous verrons obligés de fermer votre compte”. C’est ennuyeux, les quelques billets en Forint que j’introduis à l’occasion dans l’automate de la succursale servent à payer l’électricité et l’on mange déjà assez mal dans le pays. Rue Ezternyi, je trouve un bureau ouvert. Les affiches rouges avertissent le client: bienvenue dans l’ère de la “digisophie”! Comme je patiente avec quelques ménagères dépressives devant l’unique guichet, je prends le temps de lire le message d’intérêt général. Il traite de la révolution électronique. En résumé: grâce à notre application “digisophie”, faites tout en ligne!”. Signé: Votre banque. Trop tard, je m’approche du guichet. Lentement. Vingt minutes passent, c’est enfin mon tour. Une petite vielle qui mesure 1,50 mètres me demande l’origine de mes revenus. “Je n’en ai pas”. Ma réponse lui fait perdre dix centimètres. Elle gigote. Elle cherche ce qu’elle pourrait demander. Elle demande: vous avez une occupation? “Je suis écrivain”. Après avoir longuement consulté son programme, elle dit: “ça n’existe pas”. “Est-ce que vous seriez “autonome”? “Ou alors “entrepreneur”?”. Mon idée étant de me débarrasser au plus vite de la dame, de sa succursale et de la banque, je dis: “oui, c’est ça, autonome”. La dame coche la case et fait: “je ne sais pas s’ils vont accepter”. La dame dit: “si je comprends bien, vous êtes étranger?”. Oui, luis dis-je, c’est pourquoi j’ai un compte Monde que vous me facturez Euros 16.- par mois. La dame fait: “hum, le compte Monde c’est bien, mais l’important est de faire partie de l’Union Européenne!”.