Mois : janvier 2024

Difficile

De dis­tinguer aujour­d’hui entre une man­i­fes­ta­tion et la mise en scène d’une manifestation.

Parole 2

Par­ler au nom des autres est un emploi de plus en plus répan­du — autre­fois réservé aux per­son­nes raisonnables et douées. 

Tip

Per­son­nes de con­fi­ance? Les volontaristes.

Liberté

L’ex­er­ci­ce de soi n’est pos­si­ble que sous la con­trainte. Pour mieux con­trôler l’ex­er­ci­ce, il faut pro­mulguer la lib­erté. C’est à dire invis­i­bilis­er la con­trainte pour aug­menter le contrôle. 

Fenêtres

Un artiste qui veut dans l’ac­cu­mu­la­tion des jours devenir ce qu’il est, insiste et souf­fre, tombe et se relève, tombe encore mais donne des œuvres. Il finit par don­ner ce qui jamais ne serait apparu dans le monde sans ce sacrifice. 

Parole

Amis qui refusent de dis­cuter, d’opin­er, de débat­tre. Ils savent ce qu’ils savent, mais ignorent si ce qu’ils pour­raient dire cor­re­spond à ce qui est recev­able et ne leur sera pas reproché.

Fond d’écran

Ce fond indé­cid­able et intem­porel théorisé par Jung sous le nom d’In­con­scient col­lec­tif peu aus­si être envis­agé par le voie néga­tive comme indé­cid­able mais tem­porel et même immé­di­at, exerçant de ce fait une con­trainte sur les actes des indi­vidus. Bien que conçus égoïste­ment, ces actes ne seraient alors perçus comme réal­is­ables que s’ils sont ajustés à l’In­con­scient col­lec­tif du moment, tra­vail qua­si-instinc­tif qui porte l’in­di­vidu à con­sul­ter sans cesse le sen­ti­ment qu’il a de la société en tant qu’elle est com­posée de con­sciences pen­santes et agissantes. 

Musique

Com­bi­en de temps pour qu’un groupe perde son intégrité? Le temps d’être sol­lic­ité par un pro­duc­teur (applic­a­ble dans tous les domaines de l’art).

Temps arrêté

Rincón de la Vic­to­ria est un vil­lage de trois rues et 20’000 per­son­nes. Dans les rues anci­ennes, la pop­u­la­tion anci­enne, dans les con­tre­forts et à flanc de mon­tagne, les citadins, les vis­i­teurs, les touristes et les golfeurs, colons saison­niers qui s’a­bat­tent sur la région au pre­mier jour de la Semaine sainte, prof­i­tent de la plage au print­emps, com­mence de refluer mi-août; plus haut, der­rière le pic des mon­tagnes, à nou­veau les anciens. Ceux-là tenaient la côte jusqu’en 1960. Familles des pêcheurs qui vivaient loin au-dessus de la mer dans des maisons tail­lées en cubes de sucre et bar­bouil­lées d’œil­lets rouges. Les hommes descendaient le matin à leur bar­que pour remon­ter le soir. Depuis Mála­ga, en allant vers l’Est, un sys­tème de falais­es forme un chapelet de criques. Cha­cune a son nom, les plus impor­tantes ont leurs vil­lages. Juste avant Rincón (le Coin de la Vic­toire), la Cala del Moral (la Crique du Mau­re). Entre l’un et l’autre, j’ai vécu là trois ans et comme la pop­u­la­tion anci­enne est anci­enne, elle change peu. On la trou­ve dans trois rues ou, s’il ne fait ni trop chaud (moins de 30°) ni trop froid (plus de 18 °), le long de prom­e­nade mar­itime, déam­bu­la­toire de dalles posées sur une vieille fer­rovi­aire. L’heure du cré­pus­cule approche lorsque je quitte l’au­toroute pour La Cala. Nous emprun­tons avec Xam la rue qui jouxte la prom­e­nade et je trou­ve au même endroit qu’il y a trois ans, le voisin du 12 (j’habitais au 11) qui passe sa journée assis dans l’abribus du 183, l’id­iot à lunettes rafis­tolées qui harangue les voitures face à la boulan­gerie, le gitan de Vélez qui ordonne sur son bout de trot­toir mangues, avo­cats et tomates puis Anto­nio le motard-coif­feur qui s’oc­cupe dans son échoppe de ces clients (qui ont cha­cun reçu une carte a jouer pour l’or­dre de pas­sage), mais encore María la vendeuse de bom­bons dans son kiosque de tôle et les Chi­nois, tous les Chi­nois, qui sur son siège, son fau­teuil, son tabouret, le petit râblé de la Cala, l’ado­les­cente de cire, la mégère a chignon, cha­cun à la caisse de sa bou­tique, les yeux sur le télé­phone mobile, comme hier, comme demain, comme toujours. 

Auto-routes 2

J’ai fait le voy­age de l’An­dalousie pen­dant trois ans. Dix fois peut-être. De mon ancien apparte­ment à la mai­son actuelle il y a tout de même 1200 kilo­mètres. Or, la mémoire à tout enreg­istré. Va sans dire, sans que j’y mette de la volon­té. Ce matin, je le véri­fie à mesure que j’a­vance à tra­vers le paysage. Je peux dire quel pan­neau va sur­gir, quel moulin, vil­lage, pont, restau­rant. Juste­ment nous avons faim. J’an­nonce un restau­rant. Il sur­git. C’est l’Oa­sis, au sud de Jaen, l’Oa­sis, au milieu de la plus grande oliv­eraie du monde. Et là, comme chaque année, avant de m’at­tabler pour l’apéri­tif, je veux acheter mon bidon de 5 litres d’huile extra-vierge pre­mière pres­sion à froid. Comme je n’ig­nore pas que les prix ont flam­bés, j’ai pho­tographié le bidon rangé dans la cui­sine d’A­grabuey acheté au même endroit il y a un an, à quelques jours près. 2023, le bidon était à Euros 38.-; aujour­d’hui, 2024, le bidon est à Euros 72.-.