De retour dans le van au camping municipal de Saragosse, je consulte mes messages sonores. Voix souffreteuse d’Evola: “c’est le cœur, j’ai de la peine à souffler, je me suis évanoui sur le sentier au milieu des moutons, j’abandonne la transhumance, je vais essayer de rentrer sur le terrain”. Vérification faite, le message date de la veille. Il y en a un autre, la voix est encore plus faible: “les tempes battent, je n’arrive pas à décoller du lit, j’ai de la fièvre”. Ce deuxième message, posté le matin, je l’écoute à 22h30. J’essaie d’appeler Evola : pas de réponse. Sachant qu’il est seul dans la vallée, que Piedralma est invisible depuis la route et qu’il n’y a pas de couverture téléphonique (les messages sont envoyés par internet), je me demande: est-il mort? Je rappelle. Rien. Je compose le numéro des Urgences. Le service de Huesca me renvoie à la Centrale de secours des Pyrénées. Là, une militaire se met en contact avec la patrouille des Vallées occidentales. Je me couche. A minuit, la militaire me réveille: “j’ai eu la patrouille, elle va passer voir votre ami”. Un heure du matin, la militaire me réveille: “la patrouille sera bientôt sur place”. Elle rappelle: “Je viens d’avoir un contact radio, votre ami est vivant mais il ne peut pas bouger, il a de la fièvre et n’a pas voulu être emmené l’hôpital, la patrouille rappellera dès qu’elle sera sortie de la zone blanche”. Je me rendors. A une heure du matin, coup de téléphone de la patrouille: “Evola est mal en point, mais nous ne pouvons pas le forcer à nous suivre, nous repasserons demain avec des médicaments…”. Bien, je vais pouvoir dormir. Non, Evola appelle: “c’est incroyable, des militaires sont passés, j’étais au lit, c’est tout juste si j’ai réussi à me traîner jusqu’à la porte… Ils m’ont dit que tu les avais envoyés… Là ça va. Pas mieux, mais ça va… Dès que je pourrai me lever, j’irai à l’hôpital, en Suisse”.