Aujourd’hui est le premier jour de la nouvelle vie. Hors de Suisse, disposant du temps et du silence, sans travail, retranché, content. Pour atteindre ce lieu, écrire sans être repris, harcelé, emmerdé, il aura fallu huit mois. La querelle a commencé en hiver, alors que j’étais à Mahon, je venais de porter plainte contre mes collègues qui engageaient l’entreprise dans une collaboration renforcée avec l’Etat (transformant ce que nous avons créé il y a trente ans à l’époque des squats en un service de propagande). Ce vendredi j’ai garé mon nouveau véhicule — un bus muni de couchettes — dans le garage municipal d’Agrabuey. Entre temps, j’ai envoyé plus de cent-cinquante mails, des dizaines de recommandées, roulé 9’000 kilomètres dans quatre pays, vécu quarante-sept jours à l’hôtel, traité avec deux avocats, un juge, des douaniers, des flics, et Mamère et Monfrère devenus pendant la fausse Grippe déclenchée en 2019 incontrôlables et faux. Installé ce soir dans ma maison de pierre, j’ai sur le vaisselier, le buffet, les chaises, des livres collectés lors de mes visites des librairies d’occasion, un vélo statique, un vélo de course, un vélo de voyage et cinquante litres de bière brésilienne. Pour la musique, hier Djorge frappe à ma porte. De la part de son frère, un ermite qui vit avec sa femme et leur fille dans un endroit reculé de la vallée, il me remet un vinyle édition limitée : “ce qui se fait de plus dur, Dario tient à ce que tu l’écoutes !”.