Centaines de villages bâtis sur les hauteurs. La route champêtre se termine devant un bois, quelques lacets amènent à l’église. Ensuite, c’est à nouveau les champs, et à nouveau les lacets. Cela pendant des heures. Il ne pleut plus, le ciel est gris. La douleur au genou gauche m’inquiète. A midi, je fais halte dans une pharmacie, achète de l’anti-inflammatoire, avale un cachet. Pas de fontaines, pas de boulangeries, de rares épiciers. Au menu Coca-cola, barres de céréales et remplissage des bidons chez des particuliers. Au 130ème kilomètre, des jeunes parents apprennent à leur fils de deux ans à faire de la moto dans le jardin familial sans endommager les légumes du potager. “Non, me disent-ils comme j’indique ma direction, par là il n’y a plus rien”. Donc je me détourne de l’itinéraire, je me rend à Aurignac. La marchande de vins me renseigne. Je trouve le camping municipal. La barrière est ouverte, il n’y a ni client ni gérant. Au stade, une match de foot est en cours. L’entraîneur me désigne les vestiaires, je prends une douche puis je dresse ma tente à l’écart du bureau de réception. A force de chercher, je déniche une prise électrique et branche mon GPS, mon radar, mon portable. A trois heures du matin, je suis réveillé par un cauchemar. Une bande d’ivrognes m’arrache mon vélo des mains, le rouent de coups, détruisent ma BMW. J’ai un bâton pour me défendre, j’ai peur. Le cœur est à peine calmé quand déboule une voiture dans le camping. Il est trois heures et cinq minutes. Une bande d’ivrognes. Trois hommes et une femme. Cris, rires de sorcière. Cela à quelques mètres, dans le noir. Je me glisse hors du sac, rampe jusqu’à la haie, tente d’apercevoir le groupe. Une lumière éclaire la réception. J’ai caché mon matériel sous un vieux coussin, mais les câbles dépassent. Que faire? Outre leur valeur (plus de Fr. 1000.-), je ne peux continuer ma route à cette allure sans le GPS. D’une autre côté, si je récupère ce matériel maintenant, les hommes et la femme croiront que je les prends pour des voleurs. J’attends. Le groupe boit et fête jusque vers quatre heures, puis c’est le silence. Le matin, je récupère mon matériel près de leur caravane, je file. Dans Aurignac, la marchande de vin m’indique sa maison. Son mari, un féru de cyclisme, me prépare gentiment du café et des croissants.