Ousse-Aurignac, 143 km

Cen­taines de vil­lages bâtis sur les hau­teurs. La route cham­pêtre se ter­mine devant un bois, quelques lacets amè­nent à l’église. Ensuite, c’est à nou­veau les champs, et à nou­veau les lacets. Cela pen­dant des heures. Il ne pleut plus, le ciel est gris. La douleur au genou gauche m’in­quiète. A midi, je fais halte dans une phar­ma­cie, achète de l’an­ti-inflam­ma­toire, avale un cachet. Pas de fontaines, pas de boulan­geries, de rares épiciers. Au menu Coca-cola, bar­res de céréales et rem­plis­sage des bidons chez des par­ti­c­uliers. Au 130ème kilo­mètre, des jeunes par­ents appren­nent à leur fils de deux ans à faire de la moto dans le jardin famil­ial sans endom­mager les légumes du potager. “Non, me dis­ent-ils comme j’indique ma direc­tion, par là il n’y a plus rien”. Donc je me détourne de l’it­inéraire, je me rend à Auri­gnac. La marchande de vins me ren­seigne. Je trou­ve le camp­ing munic­i­pal. La bar­rière est ouverte, il n’y a ni client ni gérant. Au stade, une match de foot est en cours. L’en­traîneur me désigne les ves­ti­aires, je prends une douche puis je dresse ma tente à l’é­cart du bureau de récep­tion. A force de chercher, je déniche une prise élec­trique et branche mon GPS, mon radar, mon portable. A trois heures du matin, je suis réveil­lé par un cauchemar. Une bande d’ivrognes m’ar­rache mon vélo des mains, le rouent de coups, détru­isent ma BMW. J’ai un bâton pour me défendre, j’ai peur. Le cœur est à peine calmé quand déboule une voiture dans le camp­ing. Il est trois heures et cinq min­utes. Une bande d’ivrognes. Trois hommes et une femme. Cris, rires de sor­cière. Cela à quelques mètres, dans le noir. Je me glisse hors du sac, rampe jusqu’à la haie, tente d’apercevoir le groupe. Une lumière éclaire la récep­tion. J’ai caché mon matériel sous un vieux coussin, mais les câbles dépassent. Que faire? Out­re leur valeur (plus de Fr. 1000.-), je ne peux con­tin­uer ma route à cette allure sans le GPS. D’une autre côté, si je récupère ce matériel main­tenant, les hommes et la femme croiront que je les prends pour des voleurs. J’at­tends. Le groupe boit et fête jusque vers qua­tre heures, puis c’est le silence. Le matin, je récupère mon matériel près de leur car­a­vane, je file. Dans Auri­gnac, la marchande de vin m’indique sa mai­son. Son mari, un féru de cyclisme, me pré­pare gen­ti­ment du café et des croissants.