Ce soir, même routine qu’il y a trois ans: je quitte Rincón par la route côtière, contourne la falaise de l’Araignée et sa cimenterie, traverse el Palo, longe la plage des Curés, la Marina et le port de Malaga pour aboutir au Parc de l’Ouest où se trouve le dojo de Victor. Sauf que j’ai calculé un peu court. L’entraînement de Krav Maga débute à 19h00 et je ne suis pas encore garé. Quand j’ouvre enfin la portière, j’aperçois l’ukrainien Igor. Il est encore plus volumineux qu’à l’époque où il m’avait fait acheté un casque avant de me battre à coups de poings (quelle lubie m’avait conduit à le défier?). Igor veut savoir d’où je viens, ce que je fais et pourquoi je me tiens soudain devant lui. Toutes questions qui donnent le sentiment d’être un comédien entré en scène à contre-temps. Cela est peut-être dû au caractère slave du personnage. Peu volubile, Igor réfléchit après avoir parlé de même qu’il réfléchit quand on lui parle. Puis il manque donner suite à la conversation, laisse l’interlocuteur en suspend. Le contraire des Andalous que je retrouve dans la salle qui m’embrassent, me tapent sur l’épaule, me félicitent. Victor pareillement, l’air ravi et patibulaire. Le cours commence. A peine ai-je annoncé à mon partenaire que mon bras gauche… je ramasse un direct et un coup de pied. Douleur quand j’encaisse, douleur quand je rends. Solution : faire comme si tout allait bien. Je m’y emploie pendant une heure et demie après quoi je me retrouve seul dans les douches et pour cause: l’eau est glacée. Victor m’attend dans la rue. Nous commandons des bières sur la terrasse du billard. Je lui parle de mon projet d’autodéfense pour les femmes, il me répond “attentat, Israël, nouvelles techniques, sécurité, chaos”, mais “oui, il veut bien m’aider”. Rendez-vous est pris pour mercredi, dans une salle du quartier de Puerto de la Torre.