Ambiance vieillotte façon film de guerre en noir et blanc. Les citadins de notre Occident lumineux oublient à quel point ce flot de lumière commercial était parcimonieux il y a encore quelques décennies. Aussitôt quitté l’abord des points de trafic et de vente, les quartiers résidentiels communiquent un sentiment d’intimité, de quant-à-soi et de torpeur. Sous les façades ombreuses, des échoppes minuscules tenues par des hommes des femmes en manteau, en bonnet. Plus loin une boulangerie. L’étalage des pains est éclairé par une seul ampoule. Dans les demi sous-sols toutes formes d’activités, gymnase, pédicure, notaires visibles pour le passant à travers des impostes. Des libraires d’occasion aussi. Longtemps que je n’en voyais pas. Chacun sait qu’il faut chez nous se munir d’une adresse voire prendre rendez-vous pour avoir accès aux vieux livres. Or ici, les gens lisent. Chaque fois qu’il aperçoit une librairie, Monpère entre. “Avez-vous des livres en français?”. Hélas, ce temps-là semble révolu. La langue des Magyars s’est refermée sur son peuple: l’apprentissage des langues de culture, comme ailleurs dans le monde, a disparu avec la génération née au début du siècle.