Tous ces jours au bord du gouffre et peinant, lent à la réflexion comme à l’action, le pas indécis, le désir flou, chaos que j’imputais vite au pessimisme qui freine mes énergies et me tient dans son ombre. Pour tordre le destin, j’ouvre en cette fête Del Pilar la palestre municipale, enfile jambières rouges et gants de boxe, tape et retape dans le sac, exercice dont je reviens haletant, excité, éreinté, minable. La nuit est difficile. Quatre heures d’un sommeil plombé, réveil net, gamberge. Trois heures à jouer du cerveau à manivelle. A la pointe de l’aube, surgit le train habituel des images hypnagogiques-oniriques. A la vitesse d’une navette conduite par un fil, je m’enfonce dans le néant. Or, le lendemain, levé, lavé, coiffé, rasé, avec dans l’estomac l’encre d’un demi-litre de café Saimezo, je vois ma naïveté: j’étais fatigué, j’étais récupérant. Les 1200 kilomètres — entrés dans le corps, il fallait qu’ils en ressortent. Pour vérifier la chose, je suis allé grimper le col du Pourtalet. Pas réussi à battre le record du versant espagnol, battu le record du versant français par un frais soleil d’automne qui donne confiance dans le monde.