Comme en octobre, lorsque je voyageais en flixbus, la douane croato-slovène de Dragonja est tenue par deux policiers. L’un somnole, l’autre vise nos papiers. Un vent léger fait pencher les roseaux du canal. Au-dessus du poste tournent des goélands. Je redémarre. Seul bruit à la ronde, le moteur. A Koper, traversée du port. Entre parcs de conteneurs et terrains vagues, nous empruntons de vastes giratoires au allures de soucoupes volantes. J’engage la Dodge sur l’autoroute de Trieste. Très vite, je fais à Gala: “il se passe quelque chose de pas normal”. Cinquante, cent kilomètres, nous sommes seuls. La radio ne dit rien. Le long de la quatre pistes pour Venise, des camions en épis, mais pas de voiture. Plus tard, nous faisons halte sur une aire. Le restoroute est ouvert. Une vendeuse y travaille. Une seule. En vitrine, sous la paroi de plexiglass anti-virus, six sandwich posés à distance les uns des autres. Nous regagnons le parking un expresso à la main. Une voiture de patrouille tourne autour de la Dodge. Elle s’en va. La suite du voyage se fait à 150 km/h. Du côté de Milan, quelques voitures. Elles doublent à 180 km/h. L’ambiance ne change qu’après Simplon-Dorf, sur la descente de Brig. Là, dans une station-service où j’achète de la Cardinal, on nous explique que depuis la veille les Italiens des régions Nord n’ont plus le droit d’utiliser leurs voitures.