Boulevard

Journées molles dans l’ar­rière-bou­tique. Heureux de voir que bien des pas­sants vont sans masques. Je fais de même, et partout. Dans la cham­bre, aucun désor­dre. Un ordre incom­préhen­si­ble. J’ai rangé, et rangé encore, pré­paré et pré­paré encore et main­tenant, je ne sais plus. Je ne sais plus dis­tinguer entre ce qui va à la cave, à la poubelle ou chez les bonnes oeu­vres, ce qui vient de Umag, les affaires de vélo pour finir la sai­son d’en­traîne­ment en Aragon et les affaires gardées depuis Fri­bourg, il y a six ans, qu’il faudrait rap­a­tri­er en Espagne. Dans une bou­tique russe j’achète un télé­phone, puis deux. Séparé­ment, j’achète des cartes à pré­paiement. Avec les pré­cau­tions d’un ento­mol­o­giste, je tra­vaille le corps de ces machines et j’é­choue. Retourne chez le Russe du Sim­plon, une femme. Elle est allée chercher sa fille à la garderie, c’est son patron améri­cain qui me répond. Il ne com­prend pas: “Pourquoi, mais pourquoi est-ce que ça ne marche pas chez vous?”. Hypothèse: je vis dans un endroit spé­cial. Non, mais non, je suis à deux cent mètres de votre mag­a­sin-par­loir, boule­vard de Grancy. Il est pan­tois. En atten­dant, je viens d’a­cheter mon six­ième télé­phone en un mois (après l’ar­resta­tion en sep­tem­bre dans le train de Olten qui m’a val­ut de per­dre mon matériel) et rien ne marche. Assis sur le lit, je cherche ce que je pour­rais faire. Lau­sanne. Peu de lumière. Pas de tra­vail. Affichage à l’ar­rêt. Autorités déli­rantes. L’id­iot en chef, Berset. Celui de Genève, Pog­gia. Ne savent pas. Dictent. Folie de toutes parts. Folie médiocre. Autoin­tox­i­ca­tion. Croy­ance-résig­na­tion-faib­lesse. Mamère dit: tu exagères!”, “tu es para­noïaque!”.  “Viens te promen­er à Ouchy!” Moi, j’aimais bien Ouchy à l’époque de mon grand père, en 1976. Alors j’ou­vre une bière, une autre bière, encore une bière et regarde des com­bats de MMA des chaînes UFC et Okta­gon, Atti­la, Fer­gu­son “El Cucui” et ce génie du Dagh­es­tan, Magome­dovsharipov puis je réserve pour le lende­main une cham­bre pour­rie (je la con­nais) dans l’hô­tel plas­tique de Balaruc-les-Bains, le Brit-Hôtel, le long de la A7, ce qui veut dire que je prendrai la route au réveil, 1100 kilo­mètres pour attein­dre Agrabuey.