Viceversa

Est une revue de lit­téra­ture suisse pub­liée dans nos langues nationales. Je ne con­nais­sais pas. En août, je tombe lors d’une recherche des arti­cles cri­tiques pub­liés autour de H+ sur un compte-ren­du de mon texte: doc­u­men­té, bien écrit, élo­gieux. De quoi se réjouir. Coïn­ci­dence, un mois plus tard, la rédac­teur en chef, Clau­dine Gaet­zi, me demande une con­tri­bu­tion. Les pages don­nées à la revue seront accom­pa­g­nées d’un entre­tien et d’une séance de pho­tos. Le tout payé Fr. 400.-. Moins ras­sur­ant, le thème imposé: “la famille”. Sur laque­lle, je n’ai rien à dire et souhaite ne rien dire (à part: “depuis quand impose-t-on un thème à des écrivains?), mais je me con­va­inc qu’en lit­téra­ture on ne par­le jamais que de lit­téra­ture et que les thèmes, tous les thèmes, sont à la fois présents. Sur quoi, ayant ter­miné trois textes (OM, Paléoé­mas­sifi­ca­teur et Notr pays) et une tra­duc­tion au cours de l’été, je décide de don­ner à la revue des extraits de ce tra­vail et réor­gan­ise mon cal­en­dri­er pour me trou­ver en Suisse au moment de l’en­tre­tien et des pho­tos. Trois semaines passent, je suis à Lau­sanne, la ren­con­tre avec la pho­tographe zuri­choise est prévue pour le lende­main quand je reçois — à 20h00 le soir — un cour­ri­er de la rédac­trice. Elle dit: nous (qui “nous”?) sommes choqués par cer­tains des pro­pos que vous tenez dans votre Jour­nal d’In­con­sis­tance. Elle dit: par ailleurs, les extraits que vous nous avez fait par­venir ne trait­ent pas de la famille. Elle con­clut: “nous” annu­lons. N’est-ce pas extra­or­di­naire? Cette femme et son équipe, payés par l’E­tat, ne vous lisent pas ou du moins ne savent pas ce que vous écrivez; vous sol­lici­tent; imposent un thème façon “racon­tez vos vacances d’été”; se ravisent; et vous font la morale. Plus exacte­ment: font com­pren­dre qu’ils pensent juste et que leur idéolo­gie étant la seule accept­able, vous êtes un paria. Ain­si, il existe une lit­téra­ture offi­cielle en Suisse, une lit­téra­ture d’E­tat: cela ne sur­pren­dra pas, elle est social­iste, fémi­nine et totalitaire.