Toute la nuit je me suis félicité. Sur la place, en front de mer, les vents ont emporté parasols et devantures. Ce matin, des ouvriers venus en camionnette réparent. Ma tente n’aurait pas résisté: dernière imperméabilisation il y dix-huit ans. Surtout, j’aurais eu de la peine à m’en extraire pendant l’orage. Même dans le lit de l’auberge j’ai souffert, craignant de me retourner, renonçant à me lever, à aller pisser. Au réveil, impossible de lacer les chaussures. Cette pente dans le vignoble, au-dessus de Berchtesgaden, probablement. Le vélo à l’arrêt, j’ai arraché sans prendre la peine de passer le petit plateau. Le soir, la douleur était modeste, mais depuis j’ai roulé 405 kilomètres. Donc me voici au port. Forcé d’attendre. Pas le plus mauvais endroit. De la chambre, je vois deux petites caravelles, l’une blanche, l’autre de bois. Elles se balancent à quai. La place dallée de pierre plate à des airs de Sans Marco en miniature. L’ambiance aussi est agréable, nonchalante. Méditerranéenne, si l’on était sur l’Adriatique. Côté musique, la patronne du café Paris est amateur de new-wave, ainsi j’ai droit aux tubes des années 1980: The Cure, Kajagogo, Talk Talk, Simple Minds…