Ejea (135 km)

Quit­té Agrabuey par le chemin. Les pluies et la neige gon­flent les eaux de la riv­ière. Pour crois­er les afflu­ents, je porte le vélo. Passé Jaca, com­mence l’as­cen­sion qui mène au monastère. Sur le col, des chiens bar­rent le route. Je passe au tra­vers. Ils suiv­ent. Depuis départ pour Mala­ga il y a deux ans, j’ai oublié. Or, la descente qui mène dans la val­lée n’est pas de celles qui s’ou­blient. Pas le moin­dre coup de pédale pen­dant une demi-heure. Autour, un désert de sap­ins blancs et de roche éboulée. La route se redresse à Triste. Un pont de métal enjambe le lac de bar­rage, je domine le cours du Gal­lego. A ce moment-là, j’ai soix­ante kilo­mètres d’a­vance, il n’est pas dix heures. Détrem­pé, grelot­tant, lorsque je m’ar­rête au milieu de l’après-midi dans une can­tine, près d’un com­plexe cimen­tier, je n’ai fait que trente kilo­mètres de plus. D’abord, je ren­voie le serveur: trop fatigué pour manger. Une salade, une soupe, je me chauffe les mains sous le sèche-mains et repars. Il pleut, mais s’est surtout le vent con­traire. Si la route filait à tra­vers un relief ou des arbres, mais elle est améri­caine, une droite sur plus de quar­ante kilo­mètres. La nuit tombe quand j’at­teins Ejea de los Caballeros, demi-ville cachée der­rière des collines ter­reuses aux allures de ter­mi­tière. Un bul­gare me loge dans une pen­sion pour saison­niers arabes.