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Ce soir, après trois jours d’un silence impec­ca­ble, réu­nion dans la rue. Assis sur mon porche, un verre de bière en main, je fais face à A. le guide de mon­tagne qui depuis vingt-huit jours un détecteur de la taille d’une machine à laver sur le dos fait réson­ner les couch­es tec­toniques des cordil­lères pour le compte de l’in­sti­tut géologique. Nous rejoint le paysan, un seau de graines à la main: il est l’heure de nour­rir les poules. Il va à la riv­ière. Revient. Nous par­lons de la future autoroute. Annon­cée depuis dix ans. Qui fini­ra par pass­er. Bien qu’elle soit à 18 kilo­mètres d’A­grabuey, cha­cun red­oute pour son porte-mon­naie. Sont surtout incrim­inés les Basques de Saint-Sébastien. Ils fer­ont mon­ter les prix, vous ver­rez! Au bout de la rue, qui prend le soleil, nous apercevons Cruz-María, la fab­ri­cante de savons. Elle remonte la rue, mon­tre les fleurs qu’elle a cueil­lie: aus­sitôt grand débat, sont-elles comestibles? Enfin, venant de l’église, jouant de la canne comme s’il s’agis­sait d’un fleuret Dia­bo­lo, le péd­a­gogue, pro­fesseur de let­tres et de philoso­phie, qui par­le seul, sait tout et le reste. La con­ver­sa­tion est monop­o­lisée. Il par­le de champignons. Le paysan qui arpen­terait ses monts les yeux fer­més veut lui dire qu’il n’a pas pu les trou­ver à telle alti­tude, tel jour, dans tel pré; l’autre per­siste. Peu à peu, cha­cun trou­ve une excuse. Lui par­ti, nous revenons — dans notre rue — et pour­suiv­ons. Avant de ren­tr­er (la nuit est tombée), j’emprunte un ther­momètre pour voir si le fun­gus aux c… fait réa­gir le corps, puis je me verse du Somon­tano, de la bière, mange un chou-fleur et des Riga­toni, achète des livres sur inter­net, regarde un match de MMA, des­sine, lis, m’oc­cupe de mon fungus.