Il pleut sur Barcelone. Gare de Sants, une annonce retentit. Un train a déraillé. Les escalators déversent des voyageurs. Le souterrain se remplit. Il y a foule sur les quais. Chacun guette le fond de tunnel. Beaucoup de valises. Des regards inquiets. Les avions n’attendent pas. Depuis mon vol manqué pour Bangkok, je me donne du temps. Aujourd’hui, je me félicite d’avoir pris de l’avance. La rame pour l’aéroport arrive avec une heure de retard. Elle s’ébranle, franchit le tunnel, émerge à l’air libre. La pluie a redoublé. Un roumain joue à la trompette un standard du jazz. Un Suédois rouge écrevisse chante avec le musicien de rue, mais ne donne rien quand l’homme tend le chapeau. Banlieues aux parois taguées. Bariolages déprimants. A midi, j’embarque sur un appareil de Ryanair. Pour 4 Euros supplémentaires, le système de vente en ligne suggérait “Evitez le siège du milieu”. A ce prix, ai-je pensé, tout le monde paie. Or, sur l’ensemble des sièges, il n’y a qu’un tiers qui est milieu. Mais que je ne peux confirmer la justesse de ce raisonnement : comme annonçait la machine, je suis puni, ma place est au milieu, entre un manant médiéval (cheveux tombants, frange sur les yeux) qui se cure les ongles et une jeune géante ukrainienne. Avec le retard dû aux “autorités portuaires” quatre heures de vol dans ce siège, le plus étroit et le plus court que j’aie connu.