Notes de voyage — 9

Routes de grand dan­ger. La bande côtière défile au-dessus d’un fos­sé, à gauche passent les poids lourd. J’ai mon rétro­viseur fixé au casque mais je trem­ble. Une erreur de con­duite, je me plante le bec en con­tre­bas ou passe sous un pneu. Plus tard, c’est le vent. Un cauchemar. Latéral, par bour­rasques. Puis frontal. Alors, l’ef­fort est dou­ble. Quand je me tire enfin de cette con­trée de fab­riques à pel­lets, de garages à tracteurs et d’usines à fer­til­isants, j’ai quar­ante kilo­mètres d’une route au relief de vieille pomme. Mais je ne plains pas: c’est l’a­vant-dernière étape, demain je couche dans mon lit. A l’ar­rivée, Ayerbe. Même ville céréal­ière que ces calamités repe­u­plées à la va-vite d’Arabes, mais qui de plus s’est décou­vert un des­tin touris­tique (il faut le voir pour le croire) et ain­si, pour la pre­mière fois depuis la sor­tie de Mala­ga, je me retrou­ve dans une sit­u­a­tion que je qual­i­fierais de suisse: per­son­ne ne veut me faire un sand­wich. Ces imbé­ciles sont là pour faire de l’ar­gent pas pour servir le client, bref je n’ai qu’a acheté ce qu’il y a (il n’y a rien). Vingt heures, je me couche après 127 kilo­mètre, le ven­tre vide.