Platter 2

« Nous n’étions pas encore bien éloignés de Dres­de lorsqu’un jour, comme je men­di­ais dans un vil­lage, un paysan qui se trou­vait devant sa mai­son s’enquit de mon orig­ine. En apprenant que j’étais Suisse, il me deman­da si je n’avais pas de com­pagnons. « Ils m’attendent à l’entrée du vil­lage », répondis-je. « Amène-les ici », dit-il. Et il nous don­na un bon repas avec de la bière en quan­tité. Nous fûmes bien­tôt en belle humeur et le paysan aus­si. Sa mère était au lit dans la même cham­bre ; il lui dit. « Mère, tu as souhaité maintes fois de voir un Suisse avant ta mort ; eh bien ! en voici quelques uns que j’ai invités pour l’amour de toi ! » A ces mots, la vieille se mit sur son séant et remer­cia son fils de nous avoir régalés : « J’ai, ajou­ta-t-elle, enten­du si sou­vent dire du bien des Suiss­es que j’avais grand désir d’en voir un ; il me sem­ble que main­tenant je mour­rai plus volon­tiers. Allons, amusez-vous. »

Thomas Plat­ter, Ma vie.