D’habitude quand je quitte la table de restaurant pour aller aux toilettes, je me hâte de revenir; le plus souvent, il est trop tard, Gala a engagé la conversation avec les voisins, nous ne sommes plus en couple. Ce soir à la Trattoria, ce fut l’inverse. Aussitôt le plat de spaghetti terminé, je m’adresse en allemand, au voisin, une homme coiffé en brosse, l’oeil gauche tombant. Or, il s’agit du savant Peter Hänggi, spécialiste mondial de la résonance stochastique. En Toscane pour conférence, il est accompagné de sa femme, tous deux vivent à Augsbourg, cette ville de Bavière dont l’ambiance alors que nous y séjournions il y a deux ans m’avait parue plombée par la communauté turque. Après l’échange de politesse les femmes assises côte à côte sur la banquette parlent entre elles, tandis que Peter évoque ses voyages pour enseignement, Shanghai, Beer-Sheva, San Diego, disant par exemple “en Israël, il y a beaucoup d’étudiants palestiniens” ou encore, répondant à ma critique de la gastronomie mandarine, “à la cantine de la faculté…”, ce qui me donne l’occasion de voir que ce type de génie mathématique confond plus qu’à son tour le monde et l’université, confusion qui produisit dans les années 1990 et produit encore le politiquement correct, (ce qui, soit dit en passant, n’est pas la pensée que j’impute à cet homme intéressant et agréable). Là-dessus, retournement de situation, Peter fait l’éloge du tank M6 (connais pas) sur lequel il a servi en tant que soldat, tandis que nos femmes échangent les adresses en prévision de notre visite à leur domicile allemand et parlent d’aller boire de l’Ouzo dans notre appartement.