Une histoire amusante se déroule dans la rue, sous notre appartement. Elle a ses épisodes. Les Arabes occupent dans l’immeuble un fond de cour fermé par un rideau de garage. L’enseigne annonce “centre culturel islamique”. Pratiquement, ils se déchaussent et prient. De retour dans la rue, ils traînent sur le trottoir opposé. Voilà pour la situation de départ. Car au bout de quelques jours, l’un de ces hommes a eut l’idée d’apporter une bouteille d’orangeade et des verres. Dès lors, on traîne et on boit. Le jour suivant, on boit et on mange. Un collègue de l’homme à la bouteille tartine des demi-baguettes et vend ses sandwichs. Puis le marché s’étend. Des couvertures sont déroulées au sol, des paires de godasses et des vieux vêtements jetés sur le tas. On échange, on achète, on vend. Une véritable “histoire primitive du marché”. A ce stade, je me dis: et quoi? ils vont prier dans la rue et camper dans le square? Fin du week-end, les cantonniers apportent un camion de peinture, la police fait décamper les automobilistes garés contre le trottoir, une ligne blanche apparaît. Tout le long du trottoir, là où les Arabes font communauté. A la tombée de la nuit, les cantonniers s’en vont. Le square, la ligne, pas un Arabe. Ce matin, je me penche par la fenêtre: mêmes couverture déroulées, sandwichs et godasses. Et maintenant?