Que c’est amusant ces villageois serrés dans des maisons de pierre au fond d’une vallée de montagne, qui vont à l’eau, aux champs, à l’usine, au bois ou à la chasse aux rumeurs et au milieu de l’année, l’été venu, se réunissent pour la fête, dans leur bar, à trois cent mètres de la maison la plus éloignée, puis dans leur salle de bal, toute la nuit, ensemble sonnent les coches au petit matin, se débarbouillent, ressortent, baladent les enfants, harnachent les chevaux, font une parade, accourent à la messe, ou pour d’autres vont marcher, pique-niquer, pêcher, puis se remettent à boire, à danser et infiniment discutent, étouffant sous les rires les rancoeurs dont on devine qu’elle reviendront assez tôt après la fête. Par exemple, ce paysan, encore jeune, bien plus que moi, ce paysan dont le meilleur ami doit être un tracteur qui me lorgnait depuis plusieurs minutes, depuis le comptoir du bar, et soudain s’approche, me tend un pétard. Je déteste fumer ce genre de truc. Porté par la sympathie du geste, j’ai fait un effort.