Femmes

“Viens dans l’eau!”, me dis­ait-elle. Sauf qu’elle se baig­nait en mer d’O­man et que si je me trou­vais bien sur la grève, c’é­tait celle d’Ouchy, près de Lau­sanne, à des mil­liers de kilo­mètres. Sans hésiter, je pre­nais l’avion et débar­qué je mar­chais sur l’eau, tout habil­lé et sans lâch­er ma valise, pour la rejoin­dre, amorçant au dernier moment, comme j’al­lais attein­dre le point où elle bar­b­o­tait, un petit virage de crainte de me noy­er. Revenu sur la terre ferme, je songeais, “Quoi! Elle n’est pas l’air plus enchan­tée de me retrou­ver! Pas même sur­prise! Enfin quoi? Elle appelle, j’ar­rive et… “. Placide, je lui adres­sais une signe qui voulait dire: je vais pren­dre ma cham­bre. De ce pas, je me dirigeais vers l’hô­tel, un bâti­ment ver­ti­cal et dur auquel on accé­dait pas un vaste hall. La récep­tion était éloignée, le pan­neau qui la sig­nalait tout petit. Aus­sitôt instal­lé, j’é­tais de retour sur la grève. Assis sur les march­es mon­u­men­tales de l’hô­tel, je fix­ais la baigneuse. Elle me snobait parce que, tout en ayant couché avec elle, je n’en avais rien dit à ma femme dont elle était l’amie. C’é­tait sa façon de me le reprocher. Cepen­dant, qui était cette autre femme à mon côté qui, assise sur les march­es, regar­dait avec moi la mer? Je ne m’en sou­ve­nais pas. Pour­tant, je savais bien que c’est moi qui lui avait don­né ren­dez-vous ici, à Oman, ce soir. Elle évo­quait notre soirée du ven­dre­di et je n’en avais aucun sou­venir. Il me fal­lait main­tenant agir comme si je savais, me remé­mor­er nos moments intimes (au total deux jours), sans avoir la moin­dre idée de l’é­tat amoureux dans lequel nous étions cen­sés nous trou­ver en cet instant.