A Zurich en voiture, pour aller acheter une voiture moins plate, plus lourde, moins luxueuse, plus chère. Le rendez-vous est pris pour dix heures un quart. Le vendeur est italien, il sort de chez le coiffeur à moins qu’il ne se lève chaque matin à l’aube pour entretenir sa barbe, ses cheveux et les dégradés savants qui relient l’une aux autres. Il propose un café, me montre le véhicule. La poignée de portière est à hauteur de poitrine. Il me fait admirer le volant chauffant, le cuir, l’ordinateur, les caméras, puis propose:
- On l’essaie?
- Inutile.
Il me tend la télécommande. Je fais signe que je ne plaisante pas: je préfère boire le café. D’ailleurs, je serai bien en mal de sortir ce tank de la halle d’exposition tout entouré qu’il est de Mercedes, de Ferrari et de Corvette. Une demi-heure plus tard, l’affaire est conclue. Je passe un téléphone, l’argent arrive sur le compte. L’Italien signe le reçu et me serre la main.
-Félicitations!
Nous quittons le bureau, traversons la réception, le mécanicien-chef vient à me rencontre, décline son identité, me félicite à son tour, me remets sa carte:
-Abraham, je serai votre correspondant pour ces prochaines années. Au moindre problème, vous m’appelez! En attendant, je vous souhaite beaucoup de plaisir.
-Bien Monsieur Friederich, conclut l’Italien, nous vous la livrerons mardi.
-Où ça?
-Ici. Livraison est un terme technique, cela signifie que nous allons la vérifier et la préparer, vous avez payé pour cela.
-Combien?
-Huit cent cinquante trois.
Quelques minutes plus tard, je repars les mains vides.