Anniversaire

Munich — le 8 août Aplo fêtait ses dix-huit ans. Comme j’en avais l’in­ten­tion depuis ma pre­mière vis­ite il y a qua­tre ans, je l’ai emmené au Musée alle­mand. Au lieu de vis­iter les grandes salles où sont les bateaux et les avions, nous sommes passé par les ves­ti­aires et les toi­lettes afin de descen­dre de plusieurs niveaux et entre­pren­dre le par­cours des métiers du for­age, cir­cu­lant sous-terre entre recon­sti­tu­tions de galeries, veines de char­bon, de fer et de sel. Des enfants petits cri­aient. Les voûtes se mirent à réson­ner. Je ne dis rien. Luv réag­it la pre­mière: “ils sont pénibles!” Et Aplo: “que font les par­ents?”. L’oc­ca­sion de leur rap­pel­er la grotte d’Azé, en France. Ce jour-là, Aplo avait dix ans. Nous étions par­tis de Lhôpi­tal en voiture. C’é­tait un mer­cre­di, j’avais du tra­vail et deux télé­phones qui ne ces­saient de son­ner. Sur l’au­toroute, nous avons pris la mau­vaise bifur­ca­tion. Au lieu d’at­tein­dre la Bour­gogne, c’est Lyon que nous avons atteint. Une ban­lieue indus­trielle sous le soleil. Pen­dant que Gala inter­ro­geait des grues qui attendaient le client devant un dépôt de car­bu­rant, je négo­ci­ais un con­trat d’af­fichage. Aplo et Luv jouaient à l’ar­rière de la voiture. Quand nous sommes enfin arrivés à des­ti­na­tion, une classe de pri­maires s’est engouf­frée pour la vis­ite. Tout le long, ces goss­es que leurs pro­fesseurs ne rép­ri­mandaient en rien ont juré et chahuté, au point que j’ai fini par inter­venir m’at­ti­rant les foudres de Gala. Aplo et Luv ne s’en sou­vi­en­nent pas, mais ils doutent que ce puisse être pire que les cris de ces gnafrons qui courent à tra­vers les fauss­es galeries du musée alle­mand — pire, ça l’est. Plus tard, nous remon­tons jusqu’au jardin anglais par les berges de l’Is­ar. Aplo achète fière­ment son pre­mier paquet de cig­a­rette offi­ciel. La vendeuse du kiosque con­trôle sa carte d’i­den­tité, le félicite, lui offre des bis­cuits et un bri­quet. Enfin nous rejoignons Gala à la brasserie Oster­waldgarten, choisie parce que nous la fréquen­tons depuis que nous venons à Munich, mais aus­si parce que les deux enfants, out­re les prénoms et le nom, s’ap­pel­lent Vesten­skov, ce qui en danois, comme Oster­wald en alle­mand, sig­ni­fie “de la forêt de l’est”.