Tombo


L’arbitraire divin dans la théolo­gie protes­tante de la grâce est d’abord un argu­ment con­tre la poli­tique con­fis­ca­toire de la hiérar­chie d’église. En soustrayant les con­sciences au marché des bonnes œuvres dont le per­son­nel religieux catholique fait com­merce, cette théolo­gie nou­velle inscrit l’individu dans une rela­tion privée avec Dieu qui favorise le libéral­isme. L’avènement d’une démoc­ra­tie fondée sur les actes et les paroles authen­tiques des indi­vidus plutôt que sur les juge­ments d’une minorité qui aurait un droit a pri­ori à déter­min­er le sys­tème des valeurs est immé­di­ate­ment lié à l’entreprise de réap­pro­pri­a­tion de Dieu par le Livre que promeu­vent les réfor­ma­teurs. Qua­tre siè­cles après ce boule­verse­ment con­ceptuel majeur, les dérives autori­taires qui affectent ces jours les dif­férents pays d’Europe sont tou­jours trib­u­taires de cette his­toire du schisme. Si la sor­tie de démoc­ra­tie que con­naît la France ne sus­cite pas plus d’opposition dans la pop­u­la­tion, c’est – entre autres – du fait d’un inachève­ment psy­chologique de la notion de lib­erté indi­vidu­elle. Pour la Suisse, c’est le con­traire : la dialec­tique de la lib­erté est pro­fondé­ment ancrée dans l’inconscient col­lec­tif, mais l’insuffisante prég­nance de l’histoire nationale qui lui est cor­réla­tive provoque chez les dirigeants une forme d’atonie cri­tique qui les amène a livr­er le pays au pre­mier pro­pa­gan­diste qui donne dans l’esbrouffe et les pos­tures d’empire.