Toute l’année, les villageois réunis sur le quai mangent et boivent et parlent. A l’été, les après-midi sont longues, le silence tranché, l’ombre dure. Les aventureux — guère plus de six ou sept — restent à la plage. Un jeune téméraire rejoint pieds nus une femme alanguie sous un parasol. Il marche, il court. Il n’a traversé que la moitié de la plage. Le sable brûle. Il rebondit comme un grain de maïs jeté dans l’huile. A dix-neuf heures, le village se réveille. Les commerces font leurs affaires, les dames poussent les chiens sous les tables et boivent du chocolat chaud. Plus tard, les familles vont au parc. Les mères balancent les petits, les pères admirent les bras croisés. Les patrons tirent les câbles, branchent les téléviseurs, les écrans s’allument pour le match de foot. Puis apparaissent les coureurs du soir, ils empruntent la piste, trottinent en direction d’Almeria et les restaurants du quai se remplissent. Mais aujourd’hui, après un hiver sec et chaud et six mois passés à manger, parler et boire, c’est l’événement: un grand chapiteau est installé sur la plage pour la Feria de la tapa. Alors, ceux qui ont leurs habitudes sur les terrasses se déplacent de quelques mètres et enthousiastes font comme d’habitude tandis que sur des tréteaux chante et tape dans les mains une Andalouse de cent kilos.