Étudiant ces classiques que l’école fait lire aux enfants pour la préparation du baccalauréat, je m’étonne qu’ils soient demeurés les mêmes depuis trente ans dans une société pareillement bouleversée. Est-ce à dire que nous fixons par souci d’idéal un temps des justes représentations? Ou au contraire qu’ayant perdu toute direction critique nous préférions maintenir le status quo? Baudelaire, je ne sais pas: si sa poésie est pour moi compréhensible, elle est fastidieuse à lire et par-dessus tout, sans profit spirituel ni intellectuel. Le Mariage de Figaro. Bel et bon. Mais ce n’est qu’un vaudeville de solide facture et quant à rire — car on rit — pourquoi ne pas le faire en regardant notre société pastichée par un auteur contemporain? Ensuite, Sartre. Huis-clos. De Sartre, je suis depuis toujours le défenseur. L’Imaginaire est un de mes essais de prédilection, et puis, à certain égards, je me sens proche des existentialistes, même si mon intérêt dans le mouvement va plutôt à Emmanuel Mounier ou Denis de Rougemont. Quoiqu’il en soit, soyons certain que cette pièce passerait aujourd’hui inaperçue. Première en son genre? J’ai peine à m’en convaincre. C’est en tout cas donner à voir à quel point notre tâche de derniers venus d’une histoire littéraire dont l’empire a dominé toute la géographie intellectuelle est laborieuse: au mieux nous repoussons à grands renfort d’inventivité les limites de quelques centimètres.