Après la sieste, je me mets en devoir de réfléchir à la notion de coupure historique telle que je prétends la développer dans l’essai. Voyant aussitôt que le temps va manquer pour travailler un chapitre entier, je prends le parti de résumer les lignes directrices de l’argumentation. Mais voilà, je prends des notes depuis dix ans, elles sont réparties dans plus de vingt carnets et si au début du travail, en mars, j’ai relu l’ensemble, groupé les notes par sujet, attribué des codes à ces carnets, puis reporté ces codes sur un tableau blanc au-dessus des groupes, je déchiffre aujourd’hui ces codes sans retrouver les carnets ou trouve des carnets sans mention de codes. En ce qui concerne la coupure historique, c’est encore plus grave: alors que j’étais à bord train Genève- Fribourg, je me suis mis en devoir de synthétiser mes idées, certain d’aborder bientôt cette notion. D’ailleurs, j’y étais parvenu et fort content, je tenais ce plan de travail pour abouti, donc prêt à l’usage. Or, le lendemain, je veux me relire et, impossible de retrouver le plan! Excédé, je finis par réunir tous mes carnets (et cahiers, blocs, feuilles volantes) en une pile et procède à leur lecture avec méthode, c’est à dire page après page. Rien. Les notes prises dans le train ont disparu. Cela avait lieu il y deux mois, en avril. Cet après-midi, comme j’ai expliqué, après la sieste, je recommence l’exercice: résumer mon propos autour de la notion de coupure historique. Je vais au tableau blanc, utilise les codes pour mettre la main sur les carnets correspondants. Au bout de deux heures, j’ai un canevas. A aucun moment, je ne pense aux notes prises dans le train. Or, à vingt heures, après ma séance de sport sur le toit, je jette un œil à un livre ouvert renversé sur le coin de mon bureau depuis mon emménagement dans l’appartement espagnol, La première révolution industrielle par Patrick Verley. Et quelle révolution: toutes les notes sont là, sur les pages blanches, à la fin du livre!