Le caractère national s’exprime dans les fêtes. La corrida est une fête. Mais il est à parier que son invention est liée à un fond de comportement propre aux Espagnols. Ce fond les distingue des autres peuples. Les dernières années, j’ai roulé à vélo dans Munich. Peu ou prou, les règles sont les mêmes qu’en voiture: le cycliste ralentit au carrefour, s’arrête au rouge, démarre au vert. Il tient sa droite ou sa gauche. Le piéton emprunte le trottoir. Si le cycliste et le piéton empruntent le même espace, ils le partagent en redoublant d’attention. En Espagne, le cycliste rit, chante et parle. Il regarde partout sauf devant lui. Il fonce sur vous comme un taureau. Vous restez sur votre trajectoire, c’est la collision. Mais le génie national s’exprime surtout chez le piéton. Il semble ne pas vous voir, il ne vous voit pas. Vous allez le renverser: au dernier moment, il se déhanche et fait passer.