Mois : avril 2016

Train


Très intel­lectuel le train : on est assis et il se passe des choses.

Chartreuse


A l’instant, arrêté en gare de Valence, je sur­plombe de mon wag­on le park­ing où j’attendais Gala il y a qua­torze ans. J’habitais à la Char­treuse de Vil­leneuve, les enfants venaient de naître, Gala de avait tout juste quit­té son mari. Étrange que le temps ne passe pas. Ce qu’il s’est pro­duit entre-deux est irreprésentable quand je fixe ce park­ing. Peut-être parce que la femme d’autre fois et la femme d’aujourd’hui, bien que si dif­férentes, sont la même femme, qui porte le même nom. 

Stock


Les voitures neuves sont stock­ées sur des sec­tions d’autoroutes désaf­fec­tées et aban­don­nées, me dit mon garag­iste qui est un ancien de la GM, cela coûte moins cher que d’interrompre la chaîne de production.

Art de vivre


L’âge et sa fragilité physique don­nent un aperçu de ce monde de goû­teurs d’éternité que l’on pour­rait met­tre en place dans une société de la tem­pérance. L’accord tacite sur les valeurs per­me­t­trait alors de partager toute les promess­es de l’art de vivre ensemble.

Résistance


C’était hier et c’était il y a dix ans, j’admirais dans mes enfants tout ce qu’ils allaient devenir et je m’efforçais d’y aider, par­lant avec clarté, intel­li­gence, mod­estie, sans jur­er, comme si le monde n’était pas le monde. Tan­tôt, dans le train, une mère agis­sait de la sorte. Admirable mère ! De belles phras­es, com­posées et justes. Et quand sa gamine de six ans par­lait, elle lui fai­sait répéter en français châtié. Puis, la gamine à ren­vers­er son godet d’eau. « C’est la force du quo­ti­di­en », a dit la mère.

Reconquête 2


Nuit de cauchemar. Je dors et en dors pas. Peut-être que je dors, mais répé­tant : « ça ne va pas, il faut que je dorme ». La tête à la poids d’une enclume. J’écris trois let­tres à trois femmes, J’écris men­tale­ment, avec soin, avec le pro­jet de retran­scrire le lende­main dès le réveil. Et je songe : il faut la journée s’en tenir aux réso­lu­tions de la nuit. Le matin, je descends acheter une voiture à Oron puis retourne dans l’arrière-boutique. Je con­necte alors mon ordi­na­teur, appelle Gala et lui dis que j’arriverais en gare de Toulon le lende­main à 17heures. Elle se récrie, dit non, dit « je ne peux pas », puis « je n’y suis pas » et « de toute manière, tu ne peux pas dormir chez moi », ajoute « ce n’est pas un homme ». Au bout de deux heures, elle dit : « je déteste Toulon » et viens ! »

Réunion des vivants


Dans un café de Fri­bourg, prenant des nou­velles auprès de C. je maud­is la police dans une affaire où elle agit con­tre la loi et le bon sens, se préoc­cu­pant de ce que ma voiture, immo­bil­isée devant un por­tail de grange sur un ter­rain privé depuis le début de l’hiver com­porte de fauss­es plaques de car­ton. A la table voi­sine, un homme écoute. Soudain, entre une poli­cière. Je m’arrête de par­ler. Elle vient à moi, me salue, demande si je la recon­nais. C’est une belle femme aux yeux ronds. J’évoque un entraîne­ment à Berne. « Pas du tout, me dit-elle, nous avons fait le tour de la ville en novem­bre, vous vous sou­venez ? » Je m’excuse. Nous échangeons deux mots. Elle me quitte et s’assoit à la table voi­sine. Vis­i­ble­ment, l’homme qui écoutait est un col­lègue. Plus tard, je bois au Cor­saire, rue de Lau­sanne. Entre la prime­sautière. Je la recon­nais de dos, l’appelle par son nom, elle m’embrasse. Et quand je sors du bar pour me diriger vers la vieille Ville, un garçon et une fille me rat­trapent, des amis. Tout le monde est là : sen­ti­ment mer­veilleux de per­ma­nence, de vie, de sécurité.

Folie ordinaire


Chez Bukows­ki, l’œuvre véri­ta­ble est l’affrontement des périls dans le cours de la vie.

Choses


Ce qui en Suisse d’abord me frappe, ce sont les choses inutiles. Tant de choses inutiles induisant des com­porte­ments inutiles, l’ensemble telle­ment onéreux.

Bonheur


Ce sourire de pur bon­heur sur le vis­age d’Aplo alors qu’il observe une poule.