Notre avenir

Zarathous­tra, incar­na­tion du surhomme niet­zschéen, en atti­rant l’at­ten­tion des plus opti­mistes sur le sort du dernier homme, souligne l’im­pos­si­ble dépasse­ment de la con­di­tion méta­physique pla­toni­ci­enne puis chré­ti­enne qui con­damne la créa­ture à se penser indéfin­i­ment en tant que créa­ture et à pos­er de ce fait comme néces­saire une rela­tion à la tran­scen­dance. Le dernier homme est celui qui retombe dans l’er­reur, quitte à avoir entre­vu les pos­si­bil­ités de se libér­er du joug méta­physique. Lorsque, dans l’An­cien tes­ta­ment, Adam com­ment la faute, son pêché est, du point de vue théologique, infi­ni, car il est un pêché con­tre Dieu, être infi­ni. Un mon­tage savant, en symétrie, des événe­ments de la Genèse et des Evangiles, per­met de théoris­er le cru­ci­fix­ion comme le seul rachat pos­si­ble de la faute pre­mière d’Adan. En effet, Jésus, fils de Dieu, en se sac­ri­fi­ant pour l’homme, rachète le pêché orig­inel com­mis con­tre le Père. Ce gal­i­ma­tias, aus­si habile que con­trou­vé, per­met dans le même esprit de spécu­la­tion d’établir que si l’homme, de pous­sière cette fois, a dû recourir au sac­ri­fice de ce prophète des prophètes qu’est Jésus pour être quitte de sa faute, il n’en obtient qu’un soulage­ment sym­bol­ique. De fait, ce n’est pas lui, en tant qu’homme qui a su se racheter. En quelque sorte, la faute devient, après la mort du Christ, indéfinie. Ce qui implique qu’elle devra être revécue jour apès jour et, dans le même mou­ve­ment, faute de par­don, excusée par des expé­di­ents. Or, qui est maître de ces expé­di­ents et du dis­cours qui les légitime sinon le clergé? Sinon l’Eglise?  Mais voici l’his­toire qui s’ac­célère. La tech­nique l’emporte sur le sacré, la révo­lu­tion indus­trielle con­quiert le con­ti­nent à par­tir de l’An­gleterre. Elle apporte la destruc­tion, la guerre, le bien-être et la paix. Dans la sec­onde moitié du XXème siè­cle, quand recule la prég­nance des idéolo­gies pos­i­tivistes liées aux pre­mières appli­ca­tions de masse des décou­vertes sci­en­tifiques, le peu­ple se tourne vers la matière en tant que matière et, pro­gres­sive­ment, installe dans les sociétés des rap­ports non-médi­atisés par le sacré. Con­séquence évi­dente, le clergé recule.L’homme n’est pas libre — il ne s’ag­it aucune­ment du surhomme niet­zschéen — mais il n’est plus inscrit en tant que créa­ture dans cette rela­tion de créa­ture à créa­teur où il occu­pait, fatale­ment, indéfin­i­ment, le pôle faible. Dès lors, le clergé d’église perd de son influ­ence. L’oe­cuménisme est la meilleure preuve de la perte défini­tive du pou­voir des médi­a­teurs chré­tiens qui, au nom de la foi et de la repen­tance, main­te­naient l’homme dans son statut de créa­ture inscrite dans une rela­tion méta­physique. Hélas, si le cap­i­tal­isme et ses pro­grès tech­niques à détru­it le clergé d’église et son pou­voir, il a dans le même temps décrédi­bil­isé le pou­voir en tant que tel, à com­mencer par celui qui fait tou­jours alliance avec l’église, celui de l’État. Or, une État sans peu­ple, cela ne se peut pas. La situ­aion de l’E­tat en ce début du XXième est celle d’un pou­voir inopérant, ven­du sur une base de pro­pa­gande à un peu­ple qui, aver­ti con­tre les inter­mé­di­aires, est con­va­in­cu que toute inter­férence addi­tion­née aux impéraifs de la ges­tion économique du monde, relève de la vampyri­sa­tion. C’est pourquoi les Etats occi­den­taux cherchent par tous les moyens à élever les cultes prim­i­tifs du tiers-monde, à com­mencer par son représen­tant  majeur, l’Is­lam, au rang de reli­gion d’E­tat. Afin, le moment venu, de faire alliance avec lui, con­tre le peu­ple ou, à défaut, si cette reli­gion prim­i­tive, importée en même temps que ses fidèles, devait pré­ten­dre ren­vers­er l’E­tat, pour se porter garant du peu­ple con­tre cette men­ace. Dans les deux cas, cela appa­raît comme le seul moyen pour les Etats occi­den­taux de repren­dre la main sur des peu­ples qui, suré­duqués et utile­ment cri­tiques, se défient de tous les pou­voirs. La voie moyenne qu’un esprit libre peut espér­er tenir face aux menées autori­taires de ces Etats aux pro­grammes délétères con­siste à refuser la posi­tion de fer­me­ture ontologique du dernier homme et à ten­dre con­tre toutes les églis­es, tous les courants idéologiques et bien enten­du, con­tre les pou­voirs d’E­tat, vers une incar­na­tion, à hau­teur des moyens réels de l’homme (non aug­men­tés au sens du posthu­man­isme) du surhomme.