Le grand restaurant

Restau­rant en plein air le long de la route munic­i­pale. Alen­tour, des arbres, des mares, la nuit. Le per­son­nel est en livrée et en surnom­bre. La salle compte cinquante tables. A un bout, un cou­ple à la retraite. Lui mange sa soupe. Pour se don­ner du courage, il garde sur la tête son cha­peau mou mod­èle Croc­o­dile Dundee. A l’autre bout, une famille de chi­nois sonores. A peine sommes nous servis que Gala pro­pose de chang­er de table.
- Il fait froid.
Elle appelle. Un gamine accourt. Elle écoute Gala, s’en retourne. Elle reparaît avec sa supérieure hiérar­chique.
- Too cold!
Toutes deux filent au comp­toir — qui est situé à 50 mètres — revi­en­nent avec un comité com­posé du gérant, du maître d’hô­tel et des serveuses. Ils com­pren­nent, rient, font la courbette.
Nous changeons de table.
Quelque min­utes plus tard, je me rends aux toi­lettes. Il faut tra­vers­er la salle, tra­vers­er deux cours, emprunter un trot­toir, bref, c’est une longue marche. Au bout de laque­lle, je trou­ve dans le noir du lieu d’ai­sance, l’air exta­tique et gêné, un mar­mi­ton et le gérant. L’acte étant con­som­mé, ce dernier se lave la verge dans l’urinoir.