Repas

Sur la colline de Pai où Guy range son matériel de nav­i­ga­tion. Il cui­sine un porc sauce cit­ron­nelle et lait de coco. D’autres Français sont invités. Un cou­ple qui vit dans la val­lée six mois par an. Jacques est sobre et réservé. Quand il par­le, les autres l’é­coutent. Sa femme par exem­ple. Un car­ac­tère. Vis­age bur­iné, épaules devant, coudes devant, et une gouaille! D’ailleurs, toute nuance de lan­gage sem­ble la gên­er. Si vous dites, “ils sor­taient ensem­ble”, elle traduit: “il bai­sait cette bom­basse”. Elle dans son élé­ment — n’y serait-elle pas que cela ne la gên­erait aucune­ment — puisque la con­ver­sa­tion porte sur le sexe et la nour­ri­t­ure. A croire que c’est là ce qui manque aux expa­triés. L’autre invité est un ancien ten­ancier de bar de Ménil­montant, qui tra­vaille, ce sont ses mots, “dans une obscure officine de l’E­tat à Paris”, et attend pour s’in­staller dans cette jun­gle que sa vieille maman meurt. Plus tard, le cou­ple racon­te son voy­age au Cam­bodge, tenu qu’il est, comme tous les touristes (Guy est à ce régime depuis trente ans) de quit­ter le ter­ri­toire nation­al tous les trois mois: une hor­reur! Pays dan­gereux, dis­ent-ils, peu­plé de voleurs, de chauf­fards et de cor­rom­pus.
- C’est sim­ple, déclare France, nous ne nagions jamais ensem­ble. L’un des deux gar­dait les affaires tan­dis que l’autre prof­i­tait de la mer… et encore, en sur­veil­lant ses arrières.
L’a­mu­sant est que ces qua­tre per­son­nes se sont con­nues sur les bancs de l’é­cole, dans une com­mune mon­tag­neuse de Cor­rèze. Et soudain, les voici qui partage les derniers ragots sur leur vil­lage des Pyrénées.