Gare

Bienne ce ven­dre­di où je remon­terai le cours de La Suze à pied pour écrire le texte que demande l’un de mes édi­teurs. Le train passe par Berne. Je change de quai, brasse dans la foule, cir­cule dans les sous-ter­rains, lève les yeux et regarde longue­ment ce triste toit de poutrelles.
- Il faut que tu t’im­prègnes du lieu, a con­seil­lé l’édi­teur.
Mais pour l’in­stant je suis dans une gare, dans le bruit, dans Berne, en attente. Tout-à-l’heure que vais-je faire? Me plac­er dos au lac, me déclar­er disponible à la poésie, marcher, faire des phras­es, puis clore la séance, remon­ter en train, retra­vers­er notre société pour être déposé à Fri­bourg. Là, je taperai le texte. Il mon­tr­era un monde idéal. Le monde du canal de La Suze un jour d’au­tomne. Ce monde n’ex­iste pas, mais je viens de le créer. Et je place cette créa­tion en regard d’une autre créa­tion, celle-ci col­lec­tive, la gare de Berne.