Esprit de sérieux

L’e­sprit de sérieux, cette hypocrisie. La survie du groupe est à ce prix. Et la mort lente. L’én­ergie que demande l’in­ser­tion quo­ti­di­enne dans le tout social est énorme — la fatigue est énorme. Plus acca­blante encore lorsqu’elle se dou­ble d’une cri­tique: tout en par­tic­i­pant, je me défends d’y croire. Cela s’ap­pelle vivre d’il­lu­sions. Et d’abord, le présent est per­du. Celui qui pra­tique la chose avec mau­vaise foi entre­tient un espoir: fauss­er com­pag­nie avant l’heure. Oui, mais quand? Avant l’heure. Mais encore? Sans cesse il est rap­pelé à l’or­dre par des devoirs: une mai­son à pay­er, des enfants à élever, une car­rière à com­pléter. Rêve com­mun. Celui de l’é­pargne. Qui ne devient jamais dépense. Ces ater­moiements devant l’ob­sta­cle garan­tis­sent la survie du groupe. Au fond, entre ceux qui adhèrent et ceux qui dis­ent ne pas adhér­er, la dif­férence est men­tale. Les ado­les­cents le savent: la pro­scras­ti­na­tion est une lâcheté. Ou plutôt, ils croient le savoir. Car fauss­er com­pag­nie à la société avant que d’y être inclus est une autre forme d’illusion.