Désordre

Ren­tré tard, je me couche. Inca­pable de trou­ver le som­meil, je fais selon mon habi­tude, je com­pose des textes. D’une phrase arbi­traire, je tire une brève fic­tion. Lorsque j’ai la chose en main, j’hésite: vais-je en pren­dre note? Il en va comme des rêves, on croit se sou­venir et la nuit emporte tout. Je répète mon texte phrase à phrase, puis cède — du moins en par­tie: je n’al­lume pas. J’écris dans la nuit. Et bien enten­du, ce qui devait arriv­er arrive; aus­sitôt noté le pre­mier texte, l’e­sprit libre, j’en invente un sec­ond que je note à son tour, puis un troisième. Cela me rav­it car ce sont des textes de pure inspi­ra­tion et au con­tenu aus­si dif­férent qu’il est pos­si­ble de mes automa­tismes d’écri­t­ure. Passe une semaine. Je me promets de les met­tre au pro­pre, n’en fais rien. A l’oc­ca­sion, les pre­mières phras­es de ces textes me vien­nent en mémoire et je me fais une joie de les repren­dre. Hier enfin, j’ou­vre le car­net et là, décep­tion: j’ai sous les yeux une écri­t­ure illis­i­ble. Dans un pre­mier temps je ne doute pas de pou­voir la déchiffr­er et puis il me faut renon­cer. Non seule­ment je ne peux espér­er retran­scrire, mais la cal­ligra­phie est si désor­don­née que je n’ai plus accès à la moin­dre infor­ma­tion con­cer­nant la teneur des trois fictions.