Le recours incessant au mot “crise” permet aux politiciens de conforter le peuple dans l’idée que leur action vaut remède. La crise est passagère, il n’est que de trouver les solutions pour y mettre fin. Remplaçons maintenant ce mot par l’expression “rééquilibrage économique”. Alors le rôle des politiciens est discrédité. Il n’est aucun moyen de lutter contre les effets d’une compétition entre pays engagés sur le marché international sinon le travail. En d’autres termes, eu égard aux avantages comparatifs de l’Europe, tout porte à croire que dans les prochaines années (et j’excepte ici les expédients que seraient la guerre, la colonisation, un changement de régime…) le niveau de vie sera divisé par quatre. Si l’on s’en tient à l’analyse de la décision politique que fait Habermas dans La technique et la science comme idéologie, la classe politique ayant renoncé, faute de valeurs sur lesquelles la fonder, à toute pratique autonome de la décision, et après s’en être tenu à l’application de solutions technique mises en évidence par le travail des experts, dupe éhontément le peuple en usant d’un mot, le mot “crise”, qui lui permettra, espère-t-elle, de se maintenir au pouvoir (alors que celui-ci, logiquement, devrait revenir aux techniciens — principe d’action évident de la technocratie bruxelloise).