A la déchetterie des Neigles, sur les bords de la Sarine. La BMW est chargée. C’est peu dire. Une palette et demie de brochures. Une demi-tonne de papier. La carrosserie paraît surbaissée. Je descends Varis, emprunte le pont de Zaehringen, rejoint la basse-ville avec prudence, lenteur. A l’entrée du site, une barrière et un gardien. La même fonctionnaire de voirie qu’à Noël. Ce jour-là, j’étais arrivé par un chemin de forêt, le seul autre point d’accès, privatif, étroit et interdit, de sorte que le personnel du site avait défilé devant le véhicule pour évaluer ma prouesse.
- Vous êtes arrivé par la rue de Morat! Mais… vous savez que c’est impossible?
La même fonctionnaire disais-je, cheveux courts, visage ronde d’une paysanne, gestes masculins. J’abaisse la vitre. Elle considère les liasses de brochures neuves.
- Qu’est-ce que c’est?
- Des magazines.
Elle vérifie. Ce sont des magazines.
- Et de quoi traitent-ils?
Sans perdre mon aplomb, quoique surpris:
- De la vie étudiante.
Elle réfléchit.
- C’est bon.
Aux Etats-Unis, il y a quatre ans, en route pour Las Vegas, la même histoire à la douane de l’aéroport de Los Angeles.
- Ce sont vos enfants?
- Oui.
- Montrez-les.
- Les enfants, regardez le Monsieur!
- Et votre femme?
- En Suisse.
- Que fait-elle en ce moment?