Au Krav Maga, exercice de défense les coudes devant. Après plusieurs changements d’adversaire, me voici confronté à un jeune de grande taille au crâne ras. Il assène un coup. Je reprends mon souffle, bande les muscles. Second coup. Il hésite. Je l’encourage à taper fort. Il prend de l’élan, du plat du coude frappe à la hauteur du plexus. Naïf, je lui fais signe de continuer. Alors il tape pour tuer. Je perds un mètre de terrain, rétablis mon équilibre, me tâte, constate que je n’ai pas le sifflet coupé, ressens une douleur puissante, dis que ça va, et en effet, comme nous entrons dans la deuxième heure d’entraînement, que le corps est chaud, ça va. Mais à vingt-deux heures, de retour à la maison, et le lendemain, dans l’avion pour Malaga, j’ai l’impression à chaque pas, geste, souffle, que je soulève un sac de toile qui contiendrait un vase brisé. Des bruits de trousseau de clefs résonnent derrière la poitrine. Je tousse, respire, m’étends, m’étire, lis et relis des notices trouvées au hasard sur internet pour déterminer si les côtes sont cassées, fêlées, ou s’il s’agit seulement de la mémoire du corps occupé à digérer le choc — sans que le mal ait cessé, une semaine plus tard, je ne sais toujours pas.