Théâtre

Une cliente me joint au télé­phone. Elle veut savoir si j’ai dis­tribué ses fly­ers. Quand avez-vous fait votre pre­mière tournée? Il y en avait deux, n’est-ce pas? Quand? Elle veut me pren­dre en défaut, en vain: je suis sérieux dans mon tra­vail. Elle mar­que une silence, puis hausse le ton. Je com­prends alors qu’elle fai­sait diver­sion: ce qu’elle voulait me dire c’est que les affich­es qu’elle a envoyées lui sont rev­enues, que son spec­ta­cle va à l’échec, que c’est une cat­a­stro­phe! Elle est furieuse, c’est de ma faute, d’ailleurs jamais elle n’au­rait dû me faire con­fi­ance, on ne peut pas tra­vailler avec des per­son­nes dans mon genre, de plus, fatiguée comme elle est, avec tout de tra­vail des répéti­tion, vous vous ren­dez compte, je pré­pare mes dix affich­es pen­dant une demi-journée, vais à la poste entre deux ren­dez-vous avec les artistes et une semaine après, c’est le comble, mon paquet me revient.
- Oui, seule­ment je n’ai reçu aucun avis de retrait de col­is.
- Je véri­fierai me dit-elle, mais si vous mentez, c’est un peu fort!
Et la litanie des reproches recom­mence… Dans toute cette hys­térie, une vraie ques­tion : pourquoi, ne rece­vant pas ses affich­es ne les ais-je pas réclamer? C’est  habituelle­ment ce que je fais. Parce que la façon dont cette femme de théâtre s’ex­prime donne à croire qu’elle joue et, incon­sciem­ment, j’ai dû émet­tre un doute quant au sérieux de sa demande.