Envie de traverser. De me débattre dans un espace plus grand. Cette civilité de pacotille dans un système de murs balayé par l’air conditionné, nos pauvres, nos misérables villes de faux marbres et de stuc, arraisonne et détruit malicieusement les meilleures énergies. Traverser parce que l’espace traversé soudain résiste et donne au corps et à l’âme un surplus de vitalité, une exaltation qui est le propre de la vie. Lorsqu’on se penche sur le laboratoire du quotidien, on s’aperçoit avec effroi que la plupart des comportements tendent à produire de l’apparence et ce jusque dans les actions les plus animales: faux muscles, faux sexe, faux travail. Je sais que de telles traversées du monde — celui qui commence à nos pieds lorsqu’on a fait le premier pas — sont éreintantes et pleines d’inquiétudes, mais comment ne pas condamner cette molle conservation de la vie en milieu clos lorsqu’on sent qu’elle pervertit nos capacités et d’abord celle à qui consiste à grandir?