Chaque nuit mon som­meil est inter­rompu à 3h30. D’abord je ne m’in­quiète pas. Puis je con­clus à une coïn­ci­dence. Le  troisième jour vient le temps de chercher des raisons. Entraîne­ments exces­sifs à la boxe, à la course, au vélo? Poids de la bière sur l’estom­ac? Ecri­t­ure men­tale? Je regarde l’heure où je me couche, non, ce n’est pas cela, car ici comme ailleurs pas de régu­lar­ité. Une fois à neuf heures, une fois à une heure. au milieu de la nuit j’ou­vre les yeux, attrape la mon­tre, con­state l’heure, 3h30, n’ai pas reposé la mon­tre que l’e­sprit s’ébran­le, crépite et imprime des phras­es. S’en­suiv­ent des sec­on­des de panique: si je ne peux tir­er le rideau très vite, la nuit est per­due. Or la panique, cette enne­mie du som­meil, con­traint le cerveau à trou­ver des parades et relance la machine à penser. Au bout de la semaine j’erre en som­nam­bule, le som­meil dans le dos. Je m’ar­rête, il roule dans ma direc­tion, pèse de son poids. Je me remet en marche et me défausse. Il suit. Les jours passent, l’or­gan­i­sa­tion du soir change. Prévenu que je serai tiré du som­meil à 3h30, je décompte les heures: si j’éteins à 1 heure, et pour peu que je m’en­dorme, ma nuit ne dur­era guère plus de deux heures. La panique qui tenait entière dans cette minute où je ten­tais de blo­quer l’e­sprit gagne du ter­rain. Avec la nuit dis­paraît le jour: activ­ité sans corps la nuit, activ­ité sans esprit le jour. Le dimanche cela cesse. La fatigue m’a­bat. Je dors. Puis une autre semaine com­mence. Je me couche. Je me con­cen­tre. J’es­saie d’ig­nor­er ce mur des trois heures trente.