Lecture de Nicolas Couchepin à la librairie Albert le Grand de Fribourg. Dans l’attente du bon vouloir de l’auteur, personnes debout parmi des chaises, empruntées et gentilles. A mon côté une dame parle de mon livre 45–12 exposé sur une table près de l’entrée. Nous prenons place sur deux chaises voisines. Elle pointe un doigt sur moi.
- Mais tu es… Oui… Je suis… Enfin…
Nadine Mabille, grande amie de jeunesse de ma mère, écrivain et marraine de mon frère, dont l’expression est chaotique:
- Alors ça… Sais-tu… Je peux te tutoyer? Oui, mais bien sûr, justement je disais, tu as écrit un livre je crois, je disais à Jean-François, tu connais Jean-François? Et tu habites.… Attend que je me souvienne… Mais tu sais, nous ne sommes pas du tout en froid avec ta maman.
Un homme se penche, tend un main dubitative.
- Je suis Jean-François.
Lorsque j’étais balayeur à Lausanne, en 1985, j’habitais à Valmont, généreusement hébergé par Nadine et Jean-François.
- Je sais, nous nous connaissons.
Jean-François serre un peu plus fort ma main.
Mais voilà l’auteur. Massif, portant chapeau de feutre et foulard artiste, parlant un français impeccable avec l’accent jurassien, aussitôt sympathique. C’est d’ailleurs, je m’en aperçois alors, ce qui m’amène. Cette sympathie que j’ai ressenti lorsque je l’ai croisé pour la première fois, il y a quelques semaine, lors de la remise du prix du Roman des Romands. Sympathie toute abstraite, déduite d’une idée fausse: un accent non châtié comme celui-là annonce une écriture franche.
Nicolas Couchepin ramasse sur le haut de la pile qui nous fait face un volume de son roman Les Mensch, dit quelques mots d’introduction, lit et lit bien. Lorsque s’assourdissent les applaudissements un silence inspiré saisit l’auditoire. Certains roulent des yeux d’autres tournent la langue dans leur bouche. Puis viennent les compliments. Une dame, une autre, un monsieur.
- Ce qui est fascinant, c’est que tu as tellement bien su rendre ces personnages, on croirait les toucher, on les croirait vivants, c’est merveilleux.
Et le monsieur.
- Je crois que cette dame a tout dit, il est vrai que c’est tellement parlant, on sent si bien les personnages.
Et un autre dame.
- Je l’ai lu et cette histoire de.… Enfin, je ne veux pas vous révéler la fin de l’histoire, seulement vous dire que je suis tellement d’accord. Je me demande comment tu as fais pour te mettre dans la peau de ces personnages qui…
- Oui, tout à fait, il sont là, ils sont…
Est-ce un club de romanciers? Une association de psychologues? Un club de tricot peut-être? Ou un atelier de rencontre, ça doit être ça.