A Bethléem par le bus de ville. Nous passons sans contrôle le check-point israélien et au bout de 45 minutes le bus arrête son moteur dans une petite rue sans grâce en haut d’une colline. Aussitôt des chauffeurs de taxis nous vendent la visite. Je m’écarte mais Gala est retenue. Je reviens sur mes pas, négocie, fais répéter le prix, accepte. Nous embarquons avec nous un Allemand égaré qui veut se rendre à Jéricho (et qui nous quitte rapidement). Le taxis longe le mur de séparation, plonge dans la vallée. Le palestinien joue son rôle, celui de la victime. Pauvre destin, mais discours appris. Je me contente d’une remarque sur son anglais, de bonne qualité. Il l’a appris avec les touristes. Il nous mène le long d’un itinéraire convenu et répète: “here, take a graffiti!” Je photographie le mur, puis la vallée: d’un côté, dans le secteur B (dénomination militaire israélienne) maisons en équilibre, inachevées, linge dans les oliviers, chèvres et dépôts d’ordure, de l’autre côté, six cent maisons blanches organisées en bastion sur le haut de la colline.
- New israelien colony.
Puis nous quittons Bethléem en direction du désert du Néguev. Dans une gorge à 14 km, le monastère de Mar Saba. Edifice blanc suspendu fait de balcons, de tours et de toits. Construit par des moines d’Anatolie à l’époque de l’empire Ottoman il abritait 300 moines, trente pères y vivent aujourd’hui. Le site me rappelle la vallée d’Ilhara en Cappadoce où j’ai marché une journée en 1991. Mar Saba, dont le monastère porte le nom, s’est installé ici au Vème siècle dans une cavité de roche qui ressemble à celles que pratiquaient les moines troglodytes de Turquie aux environs de Kaymakli. Un sentier permet de se hisser au-dessus du monastère. En contrebas, à cent cinquante mètres, coule une rivière. La gorge amorce un virage et aussi loin que porte le regard, les murs de falaise sont creusés de cellules d’ermites. Sur les berges, un âne et un gosse. Je me renseigne sur la rivière. Ce sont les égouts de Bethléem, explique le chauffeur, l’eau que consomment les moines est livrée par un camion. Nous demeurons là, silencieux et admiratifs. De retour sur le parking, il faudra donner quelques shekels à un homme qui porte l’uniforme. En attendant de faire valoir son droit, il réprimande à forte voix le gosse qui du fond de la gorge remonte un fagot de bois à dos de l’âne. Image de la frustration que partagent toutes les sociétés arabes. En route pour l’église de la nativité, le chauffeur nous dit les prénoms de ses enfants, nous parlons des écoles, de la neige, su soleil. Et au moment de payer, il se dédit, change les prix, menace. Nous repartons en bus, le chauffeur reste là, quelques billets en main, devant le mur dressé par les Israéliens.