20 décembre — Berlin glacé. Les cabanes de bois des marchés de Noël délaissées. Trop froid. Moins quatorze. Nous partons à la recherche d’un bar le long du Kurfurstendam puis dans ses perpidenculaires. Nous nous précipitons notre choix. Le vent qui fouette les rues est dissuasif. Nous entrons dans une brasserie consacrée à la défaite et au mur (vielles manchettes de journaux affichées jusque dans les urinoirs.) Après quelques bières, la patron apporte des plats de cochon dont un seul suffirait à rassasier une famille. Puis concert Saint-Vitus dans un hangar perdu au fon d’un cour d’école, à l’est. Il neige. Les réverbères sont sans puissance. Halos suspendus dans le noir. Et des rafales de vent. Dans la salle, des paquets de rockers avalent de la bière en gobelets. Un heure plus tard Born too late ferme le show. La Mercedes qui nous reconduit à l’hôtel roule à 70km/h sur la croûte de glace. Le lendemain, travail en chambre avec BM et FF. Nous passons en revue les problèmes de l’entreprise. Déjeuner dans un restaurant international où de grosses serveuse lunées comme des mères nous font de l’oeil alors que nous discutons des chiffres. Ambiance adoucie par la proximité des fêtes de Noël. Sentiment d’espace, de grandeur, de qui-vive. Dynamisme organisé. Le troisième jour, fin de la réunion, chacun part dans sa direction en attendant le rendez-vous à l’aéroport de Shönfeld. Je marche six heures dans le quartier des universités — un erreur, je croyais rejoindre la rue où nous avons habité avec Gala l’an dernier — Oranienstrasse, Friederichstrasse. Ciel et canaux gelés, tapis de neige grise, chuintement des pneus des voitures. Je me réfugie dans un centre commercial. Et mange et achète. A 17 heures, rendez-vous dans le wagon transformé en bar qui flanque l’étage des arrivées de l’aéroport. Une polonaise étique sert de la bière sur des tables en mica. L’absence de chauffage nous pousse dans l ‘aéroport. Plus tard l’avion décolle sur vingt centimètres de neige. A peine a‑t-il pris de l’altitude, nous apprenons que l’aéroport se ferme au trafic. En Suisse, c’est la tempête. Les bus genevois ont cessé le service, des voitures sont en travers de la chaussée, les passants avancent sur la pointe des pieds. Nous buvons chez les Galiciens. FF rentre en vélo, je déroule un matelas et dors dans le bureau.