En 1983 j’allais en Espagne. Le passage de frontière se faisait à l’aube, les yeux fermés, dans Port-Bou, et à Santz, gare nouvelle de Barcelone, les trains bloquaient. En surface, autour du bâtiment dont on décrochait les échafaudages, était un terrain vague et même plusieurs. La saignée avait supprimé deux ou trois blocs de maisons. En bordure les autres étaient restées et les indigènes de banlieue, tranquilles, sortaient leur chaises de paille devant les négoces. A celui qui vendait des alcools et des bonbons nous avons pris trois bouteilles de champagne que nous avons sifflées dans la halle de gare en recomptant notre argent de poche et un garde-civil, émoulu fraîchement de la dictature, m’a conduit au poste pour me tirer les oreilles et me menacer de je-ne-sais quel pouvoir qu’il venait de perdre par le retour du roi.