En plein sommeil, je demandais à mon collègue de trente ans avec qui j’ai ces jours un différend sur le modèle de gestion de notre entreprise : “et que deviennent les personnages historiques à l’ère de la production industrielle des individus?”
Carson McCullers
“Un soir, un homme m’a suivie dans l’escalier et a voulu me prendre dans ses bras. Je l’ai repoussé avec une telle violence qu’il a valsé contre le mur, et je me suis barricadée dans cette chambre solitaire, avec le sentiment d’être entourée d’hommes menaçants et déséquilibrés. Je passais mes journées chez Macy’s, dans une cabine téléphonique, où je me sentais en sécurité, mais, la nuit venue, retour de l’horreur et de l’insomnie.” Illuminations et nuits blanches (autobiographie).
Naturel
Mon voisin Bolín, soixante-sept ans, vêtu d’une salopette usée, à son côté un chien à barbe coiffé comme il l’est, en pagaille. Barman avant de prendre sa retraite, ce dont témoignent les poches sous les yeux . Il y a quelques années, il rentre du travail tard dans la nuit, ivre et plus que ivre. Au croisement de la nationale et de notre route des Vallées occidentales des Gardes civils embusqués l’interceptent. Incapable de tendre à travers la vitre abaissée les papiers qu’exigent les gardes, il bafouille, il divague. Soudain, ignorant l’ordre des gardes qui lui intiment de rester à bord du véhicule, il ouvre la portière et descend : “laissez-moi, je dois pisser!”. Les gardes désignent la forêt. Bolín entre dans la forêt, ne revient pas. Il rentre au village en passant par le col. Le lendemain, les gardes se présentent à sa porte. Encore ensommeillé, il leur dit : “donnez le ballon, je vais souffler.”. L’amende qu’il reçoit sanctionne un “stationnement interdit”.