Depuis la gare El Trebol, bus bondé pour le lac Atitlan. J’allais à Antigua, mais un cortège de Semaine Sainte occupe les rues, le chauffeur de l’aéroport pense que cela peut prendre une journée. Tandis que le bus multicolore piloté par un chauffeur à chapeau large souffle des gaz noirs dans les embouteillages montent successivement à bord un homme de Dieu (bible à la main il délivre un sermon sur le thème du temps, bénit les voyageurs, descends du bus, monte dans un autre bus), un vendeur de chewing-gum Trident, un fruitier, un cancéreuse qui mendie pour son traitement et deux personnages extraordinaires: le premier raconte sa vie avant que d’exhiber une pèle-agrumes et de faire une démonstration de coupe sur un carotte de grande taille, tout un art quand je dois, assis, me tenir pour ne pas être éjecté dans le couloir et un vendeur d’élixirs, doué pour le boniment, qui fait passer entre les voyageurs une bouteille de 1 litre de Sang de taureau. Nous quittons la capitale par des pentes verticales avant de plonger dans la vallée suivante. La vitesse de conduite est folle. La musique empêche de se parler. Les fenêtres tremblent. Des femmes en habit indien cuisinent sur le bord de la route. Les camions ahanent, les motos dépassent. A Solola j’achète une ceinture de cuir et mange un poulet. Le soir, sur le lac d’Atitlan, à Panajachel, je rejoins la foule occupée à déambuler entre des milliers de cahutes installées sur le limon des berges.