A me balader ainsi avec Luv dans Neuchâtel, je constate que j’y suis venu ces vingt dernières années dans les mêmes conditions toujours, muni d’affiches à coller, couratant selon un circuit rôdé, de la patinoire à la Case-à-chocs et de la basse-ville à la gare, déroulant mon scotch “au carré” autour des A2 de nos clients, vérifiant qu’aucun flic ne me trousse, ne voyant que les murs déparés, les armoires électriques, les vitrines vides. Ce matin, je devise en compagnie de ma fille dans le quartier des Universités en attendant le rendez-vous de quatorze heures avec le Conseiller aux études. Menu — non “plat”, d’ailleurs minuscule, qui donne faim plus qu’il ne rassasie — dans la belle salle aux faïences de la brasserie du Cardinal, puis visite à la boutique de vinyles “Vinyl” dont je franchis la porte en observant, là encore, que je recule depuis des années, pressé par mes tournées d’affichage (après Neuchâtel, il fallait encore “massacrer” avant la fin de la journée Bienne et La-Chaux), le moment de fouiller ses bacs. Au propriétaire, je demande Youandewan, Biosphere, Altarage et Jr Rodriguez. Il n’a pas. Je le félicite pour sa boutique, promets de revenir. Un moment à regarder les cygnes, les cols-verts, les groupes d’étudiants et un homme dans la force de l’âge qui allongé sur une chaise-longue devant l’aula de la Facultés des Lettres bronze a demi-nu sous un soleil modeste, puis nous écoutons l’exposé du Conseiller sur le cursus en Sciences de l’information que projette de suivre Luv, entretien dont je ressors convaincu (tout comme elle), presque envieux des études qu’elle va commencer, certain comme déjà je l’étais à son âge, vingt-et-un ans, que le travail est la pire des malédictions.